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08/01/2014

"Il faut connaître ce qui se passe dans son coeur" 

Le pape jésuite appelle les chrétiens au discernement intérieur :

 


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Zenit :

« Le chrétien est un homme ou une femme qui sait surveiller son cœur » afin qu’il ne soit pas comme « un marché local » où l’on « trouve de tout », a déclaré le pape lors de la messe de ce 7 janvier 2014, à la Maison Sainte-Marthe. Durant l’homélie, le pape François a commenté l’exhortation « Demeurez dans le Seigneur », dans la première lecture (1 Jn 3,22-24.4,1-6). Pour « demeurer dans le Seigneur », a-t-il expliqué, il faut « connaître ce qui se passe dans son propre cœur », c’est-à-dire « éprouver les esprits », « discerner les esprits », discerner si quelque chose « fait demeurer dans le Seigneur ou au contraire éloigne de Lui ». Le cœur humain « a toujours des désirs, des envies, des pensées ». Mais « viennent-ils du Seigneur ou éloignent-ils du Seigneur ? ». Le baptisé doit le « vérifier ».

« Le chrétien est un homme ou une femme qui sait surveiller son cœur. Souvent, le cœur, avec tout ce qui va et vient, ressemble à un marché local : on y trouve de tout… Souvent, le cœur est une route, tout le monde y passe… Vérifier. Il faut sonder, pour demeurer dans le Seigneur : ceci vient du Seigneur, mais cela, non… ».

« Beaucoup de faux prophètes sont venus dans le monde. Des prophètes, ou des prophéties, ou des propositions : ‘'J’ai envie de faire ça !’'. Mais cela ne conduit pas au Seigneur, cela éloigne de lui. Voilà pourquoi la vigilance est nécessaire. »

Le critère de discernement est « la voie de Jésus-Christ », qui « était Dieu », et qui « s’est abaissé, s’est humilié » jusqu’à « mourir sur une croix ». Cette voie « d’abaissement, d’humilité, d’humiliation pure » est le critère ultime : « Si une pensée, un désir te conduit sur cette voie de l’humilité, de l’abaissement, du service des autres, elle vient de Jésus. Mais si elle te mène sur la route de la suffisance, de la vanité, de l’orgueil, sur la route d’une pensée abstraite, cela ne vient pas de Jésus. »

Pour conclure, le pape a invité le croyant à « connaître ce qui se passe dans son cœur » en faisant un examen de conscience : «Est-ce que je vérifie ce que je pense, ce que je veux, ce que je désire, ou est-ce que je prends tout ? Et est-ce que je choisis toujours ce qui vient de Dieu ? Est-ce que je sais ce qui vient de Dieu ? Est-ce que je connais le véritable critère pour discerner mes pensées et mes désirs ? »

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Deux commentaires :

 

> Le discernement du coeur est le but des Exercices spirituels fondés au XVIe siècle par saint Ignace de Loyola, maître spirituel de tous les jésuites et donc du pape François. Ces Exercices – à condition d'être suivis dans l'authentique esprit ignatien – sont un chemin personnel de clarification et de libération.

« Le plus original dans la manière ignatienne, ce par quoi elle constitue une nouveauté dans la conception que l'on se faisait de la recherche de la perfection chrétienne : sur l'objectivité de la lettre de l'Ecriture et du contenu de la foi, s'articule la subjectivité des motions de l'Esprit. La volonté de Dieu n'est pas un absolu préexistant s'imposant a priori et auquel l'homme n'aurait qu'à se conformer. Il n'y a pas de modèle tout fait ou objectif de la perfection... [Celle-ci] n'est pas liée a priori à aucune manière particulière de vivre, elle ne se mesure pas à la fidélité à des normes préétablies et objectivement repérables, mais à l'intériorité de la fidélité de l'homme aux exigences que la Parole de Dieu fait naître en lui. Ces exigences, que l'homme ne peut découvrir nulle part ailleurs que dans son coeur, les règles de l'élection [*] l'aideront à y satisfaire en le mettant en garde contre toutes les illusions... C'est une véritable révolution spirituelle, mais elle est vulnérable, car les illusions sont toujours menaçantes lorsqu'il s'agit de s'engager [...] en prenant comme norme la lumière divine qui éclaire le coeur de l'homme. Il y faut une préparation attentive ; c'est précisément au moment où l'on aborde la matière de l'élection que sont proposées [par les Exercices] les méditations des Deux Etendards et des Trois hommes, ainsi que la considération de trois types d'humilité, dont la fonction sera de fournir des critères de vérification... »

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[*] « Son désir désormais libéré, l'homme peut reconnaître l'appel de Dieu dans sa vie et y répondre. C'est l'élection. Il n'a plus alors rien à désirer, mais à vivre de ce qui lui est donné. »

(Introduction du P. Jean-Claude Guy s.j. aux Exercices spirituels de Saint Ignace de Loyola, Points-Seuil).

 

  

> Le propos du pape François fait aussi penser à saint Augustin, Commentaire de la première épître de saint Jean au traité VI, 3 (Cerf, pp. 283-285) :

« Te voilà devant Dieu, interroge ton coeur ; vois ce que tu as fait, et ce que, ce faisant, tu as désiré : ton salut ou une vaine gloire humaine ? Regarde au-dedans, car l'homme ne peut juger celui qu'il ne peut voir. Si nous apaisons notre coeur, apaisons-le devant Dieu. Car ''si notre coeur nous condamne'' [dit saint Jean], c'est-à-dire s'il nous accuse intérieurement, parce que nous n'avons pas agi avec l'intention que nous devions avoir, ''Dieu est plus grand que notre coeur'' et Il connaît tout. Tu caches aux hommes le fond de ton coeur ; cache-le à Dieu si tu peux ! […] ''Bien-aimés, si notre coeur ne nous condamne pas, nous avons pleine assurance devant Dieu'' [dit saint Jean]. Qu'est-ce à dire, ''si notre coeur ne nous condamne pas'' ? S'il nous répond en toute vérité que nous aimons, et que la dilection fraternelle est en nous : dilection sans feinte, sincère, qui nous fait chercher le salut de nos frères, n'attendre d'autre salaire de nos frères que leur salut. […] Donc : quiconque a la charité fraternelle, et qui l'a devant Dieu, là où voit Dieu, et qui, interrogeant son coeur par un examen rigoureux, n'en reçoit pas d'autre réponse que la certitude d'avoir en lui la vraie racine de la charité, d'où sortent les fruits des bonnes oeuvres : celui-là a pleine assurance auprès de Dieu. »

Introduction à ce traité par le P. Paul Agaësse s.j. : « Il y a donc continuité et rupture à la fois. Continuité, puisque cet amour naturel, sans lequel la conscience ne serait plus elle-même, est comme le point d'insertion de la grâce dans la nature, le premier moment d'un devenir spirituel qui doit aboutir à la charité [**] parfaite. Mais il y a rupture, car cet amour ne devient pas charité par une sorte de développement spontané comme la graine devient fleur, mais par une grâce qui vient à la rencontre de l'homme et lui permet d'aimer ses frères comme Dieu les aime. De là cet aspect de nouveauté radicale qui caractérise le commandement du Christ... »

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[**] En théologie le mot charité a un sens extrêmement fort : la présence en nous de l'amour propre à Dieu, attestée par la réalité de notre amour pour nos frères.

 

 

 

Commentaires

SAINT AUGUSTIN

> Saint Augustin ajoutait le fait que le croyant, pour discerner le bien, doit être inspiré directement par la Parole divine, c'est-à-dire par Dieu lui-même. Sans cette aide intime, la tâche est difficile, voire impossible.
Ce n'est donc pas seulement une question de morale.
Nous vivons dans une société où tout le monde nous fait la morale, y compris les repris de justice. Il y a cependant une vraie morale, dans la religion chrétienne, une morale "efficace", où l'homme n'est pas seul pour juger, mais bénéficie de la grâce du Seigneur, qui est décisive.
Saint Augustin exprime très bien ce point dans ses "Confessions", également.
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Écrit par : jem / | 08/01/2014

LE LONG TRAVAIL DU DISCERNEMENT

> Le discernement constitue à mon sens la plus haute, et plus gratifiante!, expérience de notre liberté.
Cela peut prendre beaucoup de temps, avec un long, très long travail sur soi, de maturation,avant chaque décision, jusqu'à ce que l'attitude intérieure sonne juste, c'est-à-dire corresponde pleinement à tout ce que nous sommes, corps, coeur, esprit, sans rien laisser dans l'amertume - ou encore la dissonance. Oh alors cette joie intérieure, cette expérience d'être en plénitude! Il faut parfois bien des combats et des pleurs pour y arriver, tant que l'on sent en nous des esprits auxquels on est malgré nous attachés, que l'on réprouve, qui nous lient. Et c'est un travail à refaire sans cesse. Parfois aussi c'est cadeau donné dans l'instant, où l'on devient tout entier merci, merci, merci! gratitude infinie. Et pourtant extérieurement c'est pari fou que nul ne comprend.
Pour ma toute petite expérience, c'est au-travers une amitié que j'ai découvert cette pratique très concrètement, parce qu'alors il me fallait sortir des sentiers battus où il suffisait, du moins c'était ce que je croyais, suivre scrupuleusement un formalisme bien balisé. Mais face à la nouveauté et à l'inconnu -par rapport à mon vécu!-, j'ai compris que tout était à considérer à l'aune de ce seul besoin: aimer en vérité. Etre à la hauteur de cette amitié, ne pas la trahir, ne pas la fausser, mais en être la témoin la plus fidèle possible. Et le critère qui s'est imposé alors comme une irrépressible attirance du coeur, c'est:
l'amour va s'abaissant.

C'est donc d'abord parce que je me suis vécue aimée que j'ai commencé à chercher en moi comment répondre amour pour amour.
Quand je perds le fil de cette exigence intérieure, c'est-à-dire souvent!, et toujours avec une pointe de cet orgueil qui se cabre, je constate que j'agis n'importe comment et fais ce mal que je ne voudrais pas. Quand je le retrouve, et seule la pratique de cette amitié avec Jésus me réaccorde , me réencorde, oh, quel bonheur! Celle de l'oiseau ailes déployées au vent du large où il plane sans à-coup. Tout en vastes mouvements souples et harmonieux, danse- communion avec les éléments. Main du maître de choeur.
Mais force est de constater que la majorité des hommes,autant dans nos sociétés soi-disant libérées que chez des chrétiens et croyants "carrés", fuie cette liberté qui risquerait de remettre en cause ce qu'on lui a appris à faire en mode automatique, par obéissance servile, et surtout sans entrer en son âme! Au fond les hommes sont terrorisés par ce qu'ils croient être un monstre non-maîtrisable en eux. Quand c'est la vie empêchée qui sourd, bouillonne dans les tréfonds et cherche enfin à jaillir!
Le drame alors est que celui qui se vit libre, comme Socrate a pu l'être, comme le Christ l'a été, est haï par ceux qui sont complices de nos esclavages, craint par ceux qui ont à un moment renoncés, fuit par ceux-là mêmes qu'il aime et qui craignent le prix à payer, à vivre d'un tel amour, fou! aux yeux des sages de ce monde.
Les apôtres au jardin des Oliviers. Leur tristesse et leur assoupissement mortifères est la marque d'un renoncement à cet appel en eux qui leur aurait ouvert les Cieux où se déployer enfin, en ivresse d'amour. Ce dont témoignera Etienne, premier martyr. Sans l'Esprit-Saint de la Pentecôte en effet cela leur était, cela nous est impossible.

C'est pourquoi j'aime à dire que nous sommes libres à un point que nous n'imaginons pas.

J'espère que ce que j'essaie maladroitement de partager de ma toute petite expérience n'est pas trop hérétique, et je sais que j'ai encore tant à apprendre! Mais pour moi je crois que c'est chemin de libération intérieure et d'initiation à l'amour véritable.

Écrit par : Anne Josnin / | 08/01/2014

LA VOIE

> "Le critère de discernement est « la voie de Jésus-Christ », qui « était Dieu », et qui « s’est abaissé, s’est humilié » jusqu’à « mourir sur une croix »"

"ça en aiderait certains si c'était écrit comme ça, mais en fait non":

http://davidlerouge.fr/index.php?post/2014/01/08/Evangile-de-Marque
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Écrit par : klara / | 08/01/2014

DANS QUEL SENS

> Dois-je chercher à connaître ce qui se passe dans mon cœur, pour discerner ce qui vient véritablement de l’Esprit Saint, ou suivre par exemple les recommandations et les motions du monde, de la société à cet égard ?
La question ne devrait pas se poser. C’est l’Esprit qui vivifie, c’est la grâce qui constitue noblement et utilement notre for intérieur, davantage que les lois, si bonnes soient-elles, édictées en société.
Je me demande, cependant, dans quel sens trancheraient nos frères et sœurs fidèles à 'Témoignage chrétien' (salut à nos frères et sœurs les "chrétiens de gauche" !), dont le nouveau site web affiche la devise suivante : "Le site chrétien démocratique et fraternel".
Cette expression paraît claire : sur ce site, infos et commentaires ont une direction privilégiée, la dimension chrétienne de notre vie s’y soumettant aux desiderata, non seulement du frère (et du frère en Christ ?), mais de la démocratie.
Soyons certes ouverts et attentifs, avec ou sans TC, à ce que disent et vivent nos frères et sœurs, ainsi qu’aux décrets de la démocratie.
Mais gardons-nous de fermer pour autant l’oreille de notre cœur ! (comme le dit la Règle de saint Benoît : "Écoute, ô mon fils, l’invitation du maître, et incline l’oreille de ton cœur").

Denis


[ PP à Denis - La "démocratie" selon le nouveau TC ? cf son patron l'avocat d'affaires libéral JP Mignard, pour qui "honnête homme désargenté" est un sarcasme. ]

réponse au commentaire

Écrit par : Denis / | 09/01/2014

A propos du discernement intérieur:

> http://www.letempsdypenser.fr/2013/02/ecouter-leglise-avec-discernement-un-besoin-plutot-quun-devoir/
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Écrit par : Louis Charles / | 09/01/2014

CPCR

> Pour ma part, j'ai fait les exercices de Saint Ignace avec
http://www.cpcr.org/fr2/
ça décape !
et en plus, après, on comprend mieux notre Saint Père.
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Écrit par : gdecock / | 09/01/2014

Comment être touché par cette Grâce.

> D'où nous vient cette Grâce (dont assurément vient d'être touchée Anne Josnin par ce qu'elle dit dans son commentaire présenté ci-avant et que j’ai bien aimé) oui, d'où nous vient cette grâce sans la quelle notre amour naturel, en dehors de ce principe de « continuité et de rupture » dont ce P. Paul Agaësse s.j. nous parle, en dehors duquel amour naturel nous ne pouvons pas « avec pleine assurance » nous rendre chacun capable « d'aimer ses frères comme Dieu les aime » comme Jésus nous le commande?

D’où vient cette Grâce alors quand nous parvenons à être touchés par elle, sinon en conséquence de nos actes, de nous être attelés sans relâche par nos recherches patientes, longues, difficiles à « sonder » la Parole de Dieu dans ce qu'Elle attend de nous à un moment précis; d’abord en cherchant à cerner ce qui relève ou non (donc, en discernant) , dans ce que nous pensons, nous croyons, nous disons et nous faisons, de la Sagesse de Dieu et tout ce qui n’y relève pas.

N’est-ce pas pourquoi François dit que la femme ou l’homme chrétien est celui, celle qui « sait surveiller son cœur » et comme quoi, lorsqu’on est chrétien, on l’est pour toujours dans la chair, mais au moindre écart, on peut ne l’être plus tout à fait dans l’esprit au mieux pour un instant comme au pire pour toujours, pendant que d‘autres (qui ne sont pas chrétiens dans la chair parce que de par leur milieu venant d‘une autre culture que la nôtre et appartenant à la culture juive, musulmane etc. ou autre ne reconnaissant pas l’existence de Dieu…d‘où vient qu‘on est athée et.), pendant que d’autres que chrétiens - disais-je - ne peuvent pas être chrétiens dans la chair puisqu’ils n’ont pas été catéchisés dans notre foi, mais l’être dans l’esprit parce que cette fois de par leur travail intérieur fait dans leur cœur, il auront pu arriver à une telle profondeur de travail sur les principes qui régissent les lois universelles qui sont celle de Dieu…

« Il faut sonder, pour demeurer dans le seigneur: ceci vient du seigneur, mais cela, non… », chercher le « critère de discernement », cerner ce qui vient de Dieu et ce qui n’en vient pas nous dit encore François. N’est pas ce qui nous fait dire que la Grâce de Dieu, c’est le fruit délicieux d’un travail que Dieu nous fait, la « récompense » d’un travail dont la valeur ne peut être en proportion et ne dépendre qu’en rapport à la qualité de ce travail, à l’arbre se reconnaissant à ses fruits.

Ceux-ci étant ainsi, que pour en produire de tels, il aura fallu faire un travail en mesure de produire de tels fruits que nous puissions être en pleine assurance qu’ils auront résulté d’opération, que ce soit sur le plan intellectuel, mental, humain, matériel, qu’importe, mais de naturelle que nous puissions dire que nous nous sommes montrés apte à un moment, à un autre, de « comprendre Dieu, Sa Parole; ce, au point que par notre langue, notre sensibilité, notre intelligence, nous nous serions rendu capable de nous comporter, en l’occurrence comme de vrais saints, de vrais « rois » (allusion au passage des Proverbes 25- 2,12 où il est dit que « la Sagesse de Dieu c’est de cacher les choses et aux rois de les sonder ».
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Écrit par : michel Baude | 09/01/2014

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